Sur les conseils d’un ami proche, je reprends Houellebecq et partage entièrement son avis sur cet ouvrage : les livres écris précédemment par l’auteur ne l’ont été que pour l’amener à celui-ci, le meilleur et le plus abouti.
S’il y reprend des thèmes déjà explorés (misère sexuelle, vacuité des rapports humains), l’auteur se livre enfin de façon plus personnelle et expose sans faux-semblants son point de vue sur l’existence et sur la société qui l’entoure. Que l’on partage ou pas son point de vue (et les critiques virulentes des lecteurs montre à quel point il déchire l’opinion) n’est peut-être pas le plus important. L’existence même de ce regard critique, sa sincérité, sa lucidité crue, est un plus pour tous de part sa rareté dans le paysage littéraire et de part le débat qu’il suscite.
J’ai pris beaucoup de plaisir à cette lecture ; récit pathétique, déchirant et émouvant d’une existence humaine dont les désirs et l’envie d’amour ne déclinent pas, tandis que ses possibilités d’obtention du bonheur s’amenuisent. Ce texte pourrait être perçu comme une forme d’invitation au bouddhisme et à l’abandon du désir inextinguible causant notre malheur, mais l’auteur a construit en parallèle dans son récit un corollaire à peine plus engageant : l’anticipation d’une société humaine débarrassée de ses pulsions, à la vie semi végétative. Alors entre la tentation du désir et son abandon, point de salut ? Et quelles possibilités de bonheur ?
Même si ces questionnements ne sont pas récents, l’ambition de la démarche tout comme ce regard tendre et cruel posé sur une société au bord du gouffre le fait enfin rentrer à mes yeux dans la catégorie qu’il semblait briguer depuis le départ : celles des auteurs qui comptent. Je lui mets donc cette fois un grand « A ».